« Ensemble ! » est un programme local visant à accueillir et insérer au mieux les réfugiés dans la métropole de Dijon. Mais qu’est-ce qu’on y fait, concrètement ? Immersion dans un des ateliers autour de la langue, où justement, on prépare quelque chose pour VYV Festival...
À la manoeuvre derrière le dispositif « Ensemble ! », on trouve un organisme de formation, le Cesam, qui vient de fêter ses 50 ans et qui continue de s’activer. Le Cesam est né d’une association formée autour de l’apprentissage du français pour les personnes étrangères. Il a élargi ensuite son champ d’action avec le temps puisque maintenant, le Cesam va jusqu’à l’insertion professionnelle. Depuis novembre 2019 et son lancement, « Ensemble ! » travaille sur la question de l’accueil et l’insertion des personnes réfugiées de la métropole dijonnaise.

« J’aime la France » : voilà ce que l’on peut lire sur les murs du local aux fenêtres orange de la rue Jacques Cellerier.
Diego Zébina
Un Pictionary en guise de cours de français
Accueillir, oui, mais aussi intégrer via des ateliers, des sorties, des discussions et des projets concrets où tout le monde met la main à la patte. Dans les locaux de la rue Jacques Cellerier, les volets sont peints en bleu, les fenêtres et les portes sont orange. Quelques cadres et des mots écrits dans plusieurs langues agrémentent les murs. “Vivre ensemble, c’est la meilleure chose” ou « J’aime la France”, d’une calligraphie déjà précise.
Dessinez, c’est gagné !
Diego Zébina

Les participants de l’atelier du jour arrivent et s’installent autour de la table. Quelques blagues fusent. Il parait que lorsqu’on parvient à faire de l’humour dans une langue, ça veut dire qu’on est à l’aise avec. Même si tous le reconnaissent : “commencer à apprendre une langue, c’est compliqué”.
Abdallah vient du Tchad. Il a fait le voyage entre Malte et la France. “En France, trouver du travail c’est compliqué même quand tu parles la langue, alors qu’à Malte c’est facile même si tu ne parles pas la langue”, analyse-t-il. Sur une carte, il montre des villes où il a séjourné. Il connaît presque toute la France. Une bonne façon d’apprendre à communiquer ? “En France, les gens ne se parlent pas beaucoup”, avoue celui qui a la langue bien pendue. Les autres rigolent.
Les jeux s’enchaînent ce jour-là. C’est propice pour parler. Et puis c’est la meilleure façon de communiquer. Sur un tableau blanc, deux équipes dessinent au feutre des lieux ou des objets emblématiques d’un quartier. Leurs coéquipiers doivent deviner. Tout le monde y passe. Sami, venu d’Erythrée, est doué en dessin. Son équipe l’emporte.

Sami et son coup de crayon imparable.
Diego Zébina
Un programme qui conduit l’équipe jusqu’à VYV Festival
Le jeu a pour objectif de préparer l’un des grands moments de l’année. VYV Festival, pour sa deuxième édition, a proposé à « Ensemble ! » d’investir un espace pendant l’événement pour présenter ce qu’ils font tout au long de l’année. Maziar est formel : « On y va ! On a un espace et des idées ». Alors le petit groupe a décidé de partir de l’échelle d’un quartier pour raconter les différences et les points communs entre les cultures. “La notion de quartier existe dans toutes les cultures, mais sous des formes différentes, c’est ce qu’on veut montrer”.
L’idée, c’est de poser la question une bonne fois pour toute : “On vit tous dans la même ville, mais est-ce qu’on se connaît vraiment ?”, demande Léa, qui gère l’atelier ce jour-là. « Je suis en train de créer une grande feuille avec plusieurs feuilles, parce qu’on n’a pas de grande feuille”, annonce la jeune femme, en mode débrouille.
L’assemblée commence à réfléchir au parcours des festivaliers qui viendront découvrir leur espace début septembre au parc de la Combe à la Serpent. Sous la tente, une scénographe imaginera le lieu avec « Ensemble ! » : il y aura d’abord un kiosque, un garage, un coiffeur-tailleur et un restaurant. Tout ça, recréé avec une vision poétique pour symboliser leur quartier fantasmé, à la croisée des cultures. Des lieux communs et différents à la fois, pour mieux se comprendre.

And the winner is…
Diego Zébina
On y trouvera également une école, « parce qu’il faut encore déconstruire des préjugés », indique Sarah, animatrice du dispositif « Ensemble ! ». Beaucoup de gens pensent que parce que les réfugiés ne parlent pas français, ils ne sont pas éduqués.« Pour symboliser un lieu d’art, l’atelier Typon Patate va créer avec le groupe une grande carte de la métropole dijonnaise. Enfin, dernière étape du parcours « Ensemble ! » lors de VYV Festival, un café où sera proposé un cocktail avec des saveurs issues des cultures présentées.
Des cultures qui se croisent, échangent, apprennent les unes des autres, à l’échelle d’un territoire…
Pour Sarah, le rôle d’Ensemble ! est davantage de l’ordre de la médiation : « Contrairement au CESAM, Ensemble ! n’a pas de velléité à proposer de l’intégration professionnelle ; nous sommes là pour créer du lien et enseigner le français ». La structure permet aux personnes de se rencontrer, d’apprendre et d’atteindre d’autres sphères. Maziar, auparavant élève et présent ce jour-là est devenu bénévole chez Ensemble! et dans d’autres structures : Il évolue notamment au sein de la maison de quartier de l’Archipel à Dijon. Cette année, il partira au mois d’août, une semaine dans le Morvan avec une association de jardinage. Sarah précise : « Nous sommes un relai sur le territoire et nous sommes ravis quand nos élèves arrivent à prendre leur envol ! ».
C’est la vaste ambition qui nourrit « Ensemble! », à découvrir pendant VYV Festival sur les hauteurs de Dijon. Sachant qu’à la fin, c’est toujours Sami qui dessine le mieux.
Texte : Arthur Guillaumot
Photos : Diego Zébina